Copropriété – les conséquences de la Loi Alur

Une loi impactant lourdement les modalités de fonctionnement des copropriétés

La loi ALUR contient plusieurs dizaines d’articles relatifs à la copropriété. Il est évident que nous ne pouvions tous les traiter dans leur globalité, dans une revue de quelques pages, aussi avons-nous réalisé une synthèse des principales mesures touchant à la copropriété.

L’immatriculation des copropriétés

Devrait naître un Registre national d’immatriculation des copropriétés dans des immeubles à destination partielle ou totale d’habitation. Les Syndicats de copropriétaires sont tenus de procéder à la déclaration et à la modification des données les concernant.

Ce registre est tenu par un établissement public de l’Etat. Les données comprises dans ce registre sont : le nom, l’adresse, la date de création du Syndicat ainsi que le nombre et la nature des lots qui composent la copropriété, de même que, le cas échéant, le nom du syndic. Il doit également mentionner si le Syndicat a fait l’objet d’une procédure ayant conduit à la désignation d’un administrateur provisoire ou d’une procédure de carence. Au même titre, doit être indiquée une éventuelle procédure spécifique prévue en cas de péril ou d’insalubrité des immeubles. Enfin, à l’issue de chaque exercice comptable, les données essentielles relatives au bâtiment ainsi qu’à la gestion et aux comptes du Syndicat.

Notre première interrogation, en tant que professionnel, a été d’identifier l’intérêt d’un tel registre pour l’état car les copropriétés ne sont pas toutes en état de péril ou confrontées à de graves difficultés financières, prétexte abordé par les rédacteurs de la loi. En réalité, nous pensons que l’objectif est fiscal. Il ne serait pas étonnant que, à terme, les taxes foncières, taxes d’habitation et autres joyeusetés confiscatoires soient pondérées à la hausse ou à la baisse sur la réalisation de travaux liés à la modernisation énergétique souhaitée / instaurée par le Grenelle II de l’environnement.

Autre aspect, cela permettrait de recenser les revenus perçus par les copropriétés (redevances d’opérateurs téléphoniques ou d’EDF, loyers de régies publicitaires ou de tiers pour un local, …). En effet, ces derniers sont, pour le moment, intégrés dans la comptabilité d’une copropriété et ainsi neutralisées par les charges du syndicat, du point de vue fiscal, alors qu’il faudrait que chaque copropriétaire déclare sa quote-part de revenus, chaque année, en juin …

L’immatriculation ainsi que l’alimentation des données sera faite par le syndic, chaque année, après l’assemblée générale. A ce stade, la CNIL n’a pas encore été saisie du dossier pour déterminer quels seront les organismes ou personnes qui auront accès à ce registre. Toujours est-il que le syndic qui ne réaliserait pas cette immatriculation se verra sanctionné lourdement par une astreinte.

L’entrée en vigueur et le calendrier de mise en place seront déterminés par un décret en Conseil d’Etat. 

L’information des acquéreurs de lots de copropriété

Ces dispositions ont pour objet d’informer le candidat acquéreur du montant du budget prévisionnel et de l’état de l’immeuble afin qu’il puisse s’engager en toute connaissance de cause.

Création d’une fiche synthétique

Le syndic est tenu d’établir une fiche synthétique dans les immeubles à destination partielle ou totale d’habitation. Cette fiche regroupe les données financières et techniques essentielles relatives à la copropriété et à son bâti dont le contenu sera défini par décret. Elle devra être mise en œuvre avant le 31 décembre 2016 pour les copropriétés de plus de 200 lots.

L’entrée en vigueur et le calendrier de mise en place seront déterminés par un décret en Conseil d’Etat. 

Dispositions relatives à la vente d’un lot de copropriété

La loi prévoit des mentions obligatoires dans les annonces de vente de lots de copropriété (nombre de lots dans l’immeuble, quote-part annuelle moyenne de charges, procédures en cours) ainsi qu’une liste de documents à annexer obligatoirement, par le vendeur,  à la promesse ou à l’acte authentique de vente d’un lot de copropriété :

  • Fiche synthétique de l’immeuble
  • Règlement de copropriété et ses modificatifs si ils ont été publiés
  • Les 3 derniers procès-verbaux si le vendeur en dispose
  • Les documents relatifs à la situation financière de la copropriété et du copropriétaire vendeur : montant des charges courantes du budget prévisionnel et des charges hors budget prévisionnel payées par le vendeur sur les deux derniers exercices comptables ; ses sommes pouvant rester dues par le copropriétaire vendeur ;  état global des impayés au sein de la copropriété et l’état des dettes vis-à-vis des fournisseurs, quote-part d’un éventuel fonds travaux
  • Les autres documents : carnet d’entretien de l’immeuble, attestation comportant à la fois une mention sur la superficie privative du lot et la surface habitable, notice d’information relative aux droits et obligations des copropriétaires qui sera publiée par le Ministère du Logement

La sanction d’une promesse de vente incomplète en termes d’annexes : le délai de rétractation, habituellement de 7 jours, ne court qu’à partir du lendemain où le bénéficiaire d’une promesse a reçu toutes ces annexes.
Cette sanction implique donc que la sécurité de la transaction n’est pas assurée tant que tous ces documents ne sont pas produits.

Ces dispositions entrent immédiatement en vigueur, à l’exception du contenu de la notice d’information relative aux droits et obligations des copropriétaires.

Extranet à destination des copropriétaires

Le syndic sera tenu à fournir aux copropriétaires un accès en ligne aux documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble et des lots gérés, sauf décision contraire de l’assemblée générale à la majorité de l’article 25 qui pourra, ainsi, l’en dispenser. Cet accès sera différencié en fonction du statut de membre du conseil syndical ou non.

Entrée en vigueur au 1er janvier 2015

Ouverture d’un compte bancaire séparé

Le syndic doit ouvrir dans un établissement bancaire un compte séparé au nom du Syndicat, sur lequel sont versés toutes les sommes et valeurs reçues au nom et pour le compte du syndicat sous peine de nullité de son mandat, sous 3 mois. Jusqu’à 15 lots principaux, les copropriétés pourront être gérées en compte bancaire global avec des sous-comptes individualisés par copropriété, si l’assemblée générale dispense le syndic d’un compte bancaire séparé, à la majorité de l’article 25.

Il est à noter que les banques ne sont pas prêtes à ouvrir en masse environ 500 000 comptes bancaires pour 500 000 clients différents pour lesquels il faut réunir une convention de compte disposant des signatures des mandataires, un procès verbal nommant le syndic, le mandat associé et surtout le règlement de copropriété démontrant la réelle existence de la copropriété.

6 banques sont présentes sur le secteur et aucune d’entre elles n’a anticipé suffisamment tôt cette nouvelle contrainte. Car il faut bien évoquer la notion de contrainte tant pour la copropriété, le syndic que pour la banque.

Ainsi, pour la copropriété, il sera désormais impossible de tolérer des retards de paiement et surtout des budgets inférieurs à la réalité des dépenses.  Et, bien entendu, les banques factureront des frais de tenue de compte, des frais de prélèvements, des commissions, des frais de virements, … jusque là mutualisés sur un compte bancaire global au nom du syndic.
Du côté du syndic, le surcroit de travail est évident puisque chaque mois le syndic ne devra plus faire un seul rapprochement bancaire entre les écritures comptables et les écritures bancaires mais autant de rapprochements bancaires que d’immeubles gérés. Un avantage certain pour relancer l’emploi dans le secteur avec le recrutement indispensable de comptables supplémentaires. Avec des budgets nécessairement plus élevés, le coût de la garantie financière accordée par une Caisse de Garantie sera plus élevé. Cette dernière facturera également ses audits annuels plus chers puisqu’ils seront plus chers avec en raison d’un temps d’analyse plus élevé lié à la multitude de comptes bancaires.

Du côté des banques, l’intérêt de gérer autant de comptes est plus que marginal puisque les dépôts sont déjà présents en leurs livres, au tr avers du syndic qui était et reste leur interlocuteur. Quant au sacro-saint taux d’équipement du client, celui-ci est inexistant puisque le Syndicat ne sera jamais intéressé par le dernier placement à la mode, la dernière promotion sur l’assurance Habitation ou le dernier forfait mobile incluant un abonnement Deezer. En revanche, en face de ces nouvelles lignes de comptes, même si les systèmes d’information permettront une intégration de ces nouveaux clients, un temps de traitement humain et machine est à appréhender pour les quelques acteurs bancaires présents sur le secteur de l’administration de biens.

Entrée en vigueur : un an à compter de la publication de la loi et applicable aux mandats en cours à compter de leur renouvellement

Interdiction de procéder à une avance de fonds

L’article 18, II, nouveau, de la loi du 10 juillet 1965 interdit désormais expressément au syndic de procéder à une avance de fonds au Syndicat des Copropriétaires, confirmant une jurisprudence constante.

Entrée en vigueur : application immédiate

Création d’un fonds de travaux

Seules les copropriétés de moins de 10 lots peuvent s’en exonérer à la condition d’une décision prise à l’unanimité lors de l’assemblée générale.  Ce fonds est abondé à hauteur de 5 % du budget prévisionnel mais ce montant peut être augmenté par une décision d’assemblée générale.

Il sera utilisé pour tous travaux prescrits par les lois et/ou décidés par l’assemblée générale à la majorité de l’article 25 et éventuellement 25-1. Par conséquent, cela exclut, de facto, les travaux d’entretien général comme, par exemple, un ravalement …

Il est à noter que ce fonds devra être géré sur un deuxième compte bancaire séparé et les fonds versés par chaque copropriétaire, au fur et à mesure des années, seront définitivement attachés au lot et donc acquis au syndicat. Contrairement à l’avance de trésorerie, la quote-part du fonds ne donne donc pas lieu à un remboursement lors de la cession du lot.

Ce point est fondamental car il devra être anticipé par tout vendeur dans la formulation de son prix de vente afin qu’il l’y intègre.

Entrée en vigueur au 1er janvier 2017

Création d’un diagnostic technique global

Au 1er janvier 2017, pour tout immeuble à destination totale ou partielle d’habitation, un diagnostic technique global devra être réalisé en vue, notamment, d’établir un plan pluriannuel de travaux. Ce diagnostic technique global comporte :

  • Une analyse de l’état apparent des parties communes et des équipements communs
  • Un état de la situation du Syndicat au regard des obligations légales et réglementaires au titre de la construction et de l’habitation
  • Une analyse des améliorations possibles de la gestion technique et patrimoniale de l’immeuble
  • Un diagnostic de performance énergétique de l’immeuble

Il fait également apparaître l’évaluation sommaire des coûts et une liste des travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble en précisant notamment ceux qui doivent être menés dans les 10 prochaines années.

Entrée en vigueur au 1er janvier 2017

Source Cabinet QUENOT / EXCOGIM site

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